Interview de Marion Bouchecareilh
Marion Bouchecareilh présentera le 16 novembre prochain, dans le cadre de la journée Filfoie, le sujet « Recherche des facteurs génétiques en cause dans les hépatopathies associées au déficit en Alpha 1-Antitrypsine ». À cette occasion, nous l’avons interviewée sur son projet de recherche.
Marion Bouchecareilh est chargée de recherche au CNRS et son activée principale de recherche porte sur le déficit en Alpha 1-Antitrypsine (1AT), maladie génétique rare qui se manifeste par un emphysème pulmonaire et des hépatopathies. Après l’obtention de sa thèse en 2008 à l’Université de Bordeaux, elle a rejoint le laboratoire de WE. Balch (TSRI, CA, USA) pour son stage post-doctoral. Au cours de cette expérience, elle a mis en place et développé la thématique du déficit en 1AT. En 2014, elle est recrutée par le CNRS en tant que chargée de recherche dans l’objectif de développer en France la thématique du déficit en 1AT. Elle mène actuellement ce projet au sein de l’unité INSERM U1053 BaRITOn à Bordeaux.
1) Pouvez-vous décrire votre projet de recherche ?
L’objectif principal de mon projet est de mettre en évidence de nouvelles cibles thérapeutiques et biomarqueurs du déficit en 1AT. À ce jour, la transplantation du foie est la seule « solution » thérapeutique pour les personnes déficitaires en 1AT ayant développé des dommages sévères du foie (cirrhose..). Il est donc important et nécessaire de mettre en évidence, d’une part un diagnostic précoce et non invasif pour déterminer les personnes qui risquent ou non de développer des hépatopathies associées à ce déficit et d’autre part des agents pharmaceutiques pouvant prévenir et traiter les symptômes hépatiques associés au déficit. Ce travail translationnel est possible grâce aux différentes collaborations que j’ai liées et tout particulièrement celle avec le groupe du Pr. Lachaux (Hôpital Pédiatrique de Lyon, France).
2) Comment vous êtes-vous intéressée au déficit en alpha-1 antitrypsine ?
Après l’obtention de ma thèse, j’ai voulu pour mon stage post-doctoral développer un projet de recherche translationnel. Je souhaitais travailler en collaboration étroite avec des équipes médicales mais également pouvoir interagir et venir à la rencontre de patients. Je souhaitais que mes recherches, mes résultats puissent avoir une application directe dans la pratique médicale et par conséquent pour le patient. Lorsque, j’ai commencé à rechercher mon stage post-doctoral, j’ai postulé dans le laboratoire de WE Balch qui m’a proposé de travailler sur le déficit en 1AT. Mon choix s’est alors de suite porté sur ce projet qui conciliait à la fois mon envie d’explorer et de comprendre les bases fondamentales de ce déficit mais également ouvrir de nouvelles voies de traitements qui pouvaient avoir des applications directes en clinique.
3) Quelles sont les spécificités/difficultés de votre étude ?
La plus grande difficulté à laquelle je suis confrontée, comme beaucoup de chercheurs, est le manque de moyens financiers et ceci malgré les différents supports financiers que j’ai obtenu (Inserm ITMO BCDE, Ligue contre le cancer, CNRS) et en particulier ceux de l’association ADAAT qui est d’un soutien important dans mes recherches. Toutefois, les techniques comme le séquençage d’exome, les équipements ou tout simplement le matériel pour le fonctionnement quotidien du laboratoire ont un coût élevé et sans l’obtention de financements, nous ne pouvons pas développer et faire progresser nos projets de recherche. Je réponds à de nombreuses demandes de financements et j’espère que j’aurai la chance très prochainement d’obtenir des subventions importantes qui me permettront de consolider ma carrière émergente et d’établir ma recherche dans le long terme.
4) Quelles sont vos perspectives de recherche ?
Nous avons en collaboration avec le groupe du Pr Lachaux ainsi que l’équipe du Dr Gitler (Stanford, CA, USA) mis en évidence récemment l’implication de deux facteurs génétiques dans les dommages chroniques du foie associés au déficit en 1AT. Ce travail qui vient d’être publié dans la revue scientifique Plos One, nous a permis de mettre en place un « pipeline expérimental » innovant pour la mise en évidence et la validation fonctionnelle de gènes modificateurs. À partir de ce premier travail, je souhaite maintenant mettre en évidence les facteurs génétiques impliqués dans les dommages au foie associés à d’autres sous-groupes de déficitaires en 1AT. Une autre perspective de recherche est la mise en évidence de nouvelles cibles thérapeutiques du déficit en 1AT en collaboration avec la plateforme Oncoprot. Ce nouvel axe de recherche m’amène également à m’intéresser à d’autres maladies rares du foie telles que la maladie de Wilson, la mucoviscidose ou encore l’atrésie des voies biliaires.
Rendez-vous avec Marion Bouchecareilh à la journée Filfoie le 16 novembre à 15h, au campus des Cordeliers à Paris.